Ecole des mines de nancy

projet de première annee

 


 

 

 

 

 

 

 

 

Ecoulements monophasiques en milieu poreux

 

 

 

 

 

 

Isabelle CHALON

Cyril QUINTON

Ivan RODON

 

Encadrement : M. FOURAR

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Sommaire

 

 

I – Dispositif expérimental et principes des expériences

 

2

       I.1 Dispositif et notations

 

2

       I.2 Principe

 

 

4

II – Lois décrivant les écoulements en milieux poreux

 

4

       II.1 Loi de Darcy et limites

 

5

 

       II.2 Influence des forces d’inertie

 

6

       II.3 La loi de Forcheimer

 

 

7

III – Résultats des expériences

 

8

       III.1 Principe

 

8

       III.2 Résultats bruts

 

9

                 III.2.1 Cas de l’air

9

                 III.2.2 Cas de l’eau

 

11

       III.3 Calcul des coefficients

 

 

12

IV – Interprétation des résultats

 

 

13

       IV.1 Principe

 

13

       IV.2 Influence du diamètre des pores

 

13

       IV.3 Confrontation des lois empiriques

 

15

       IV.4 Influence du fluide

 

16

       IV.5 Incertitudes des mesures

 

 

19

IV – Conclusion

 

19

 

La question des écoulements de fluide à travers des milieux poreux se pose dans de nombreuses activités industrielles et intervient dans des domaines variés. Pour donner quelques exemples où de tels écoulements se produisent, on peut citer :
 

 

Il s’agit encore d’un problème ouvert puisque aucune loi générale, valable pour tout débit, ne permet de décrire précisément de tels écoulements en milieu poreux. En effet, même si la mécanique des fluides dispose d’équations permettant en théorie de décrire le comportement des fluides, la non linéarité de l’équation de Navier-Stokes fait que sa résolution est impossible formellement dans des milieux aussi complexes géométriquement que les milieux poreux. Le recours à l’expérience est donc le seul moyen de formuler les lois gouvernant les écoulements dans de tels milieux.

 

Ce problème non résolu fait donc l’objet de recherches destinées à des applications concrètes. Par exemple, le stockage de déchets radioactifs dans une enceinte d’argile fait actuellement l’objet d’études dans un laboratoire adjacent à celui que nous avons occupé pour la réalisation de notre projet.

 

Nous nous sommes donc intéressés à l’étude de l’écoulement monophasique de différents fluides dans un milieu poreux. Ces milieux sont d’une telle diversité qu’il est nécessaire d’effectuer une première modélisation. Nous avons donc choisi d’étudier un milieu constitué de billes de verre sphériques de différents diamètres. Même s’il n’existe pas de loi universelle régissant tous les écoulements de ce type, nos quelques expériences nous ont permis d’aboutir à certains résultats. L’objet de ce rapport est de présenter les différentes lois qui nous ont permis d’interpréter nos résultats expérimentaux. Pour cela, nous allons commencer par décrire le dispositif expérimental que nous avons utilisé. La présentation des résultats expérimentaux bruts suivie de leur exploitation nous permettra alors de retrouver certaines des lois qui gouvernent les écoulements monophasiques dans les milieux poreux. Enfin, nous étudierons l’influence de certains paramètres expérimentaux comme le diamètre des billes ou la nature du fluide sur les caractéristiques de l’écoulement.

 

 

I – Dispositif expérimental et principe des expériences.

 

         I.1 Dispositif expérimental et notations.

 

Un schéma simplifié du dispositif que nous avons utilisé est reproduit ci-après. Il est essentiellement constitué des éléments suivants :

 

 

 

fig. 1 : schéma expérimental.

 

Définissons dès à présent les notations que nous adoptons pour la suite :

            S désigne la section d’entrée de la cellule.

 

I.2 Principe des expériences.

 

Rappelons que dans un souci de simplification, nous nous sommes limités à l’étude d’écoulements monophasiques. Remarquons tout de même que les écoulements diphasiques, beaucoup plus courants dans l’industrie (en particulier les écoulements liquide/gaz), sont régis par des lois qui ne sont que des généralisations de celles gouvernant les écoulements monophasiques.

 

On considère donc un milieu poreux cylindrique à travers lequel s’écoule un fluide considéré comme incompressible et avec un débit constant. Cet écoulement entraîne une perte de pression que l’on mesure avec le dispositif décrit précédemment. En plaçant la cellule de manière horizontale, nous avons ainsi pu nous affranchir des effets de la pesanteur.

 

L’expérience consiste essentiellement à construire la courbe permettant de visualiser le gradient de pression  en fonction de la vitesse débitante V. L’objectif est de déterminer la loi mathématique qui constitue la relation entre ces deux grandeurs. Nous verrons par la suite qu’il n’existe pas de relation générale valable pour tous les débits, mais que différentes lois permettent de décrire le comportement du milieu selon le domaine dans lequel se situe le débit imposé. Nous verrons en particulier que nos expériences permettent de vérifier la loi de Darcy, formulée par H. Darcy en 1856 alors qu’il s’intéressait aux écoulements d’eau dans les fontaines publiques de la ville de Dijon. Malheureusement, cette loi n’est vérifiée que pour des débits « faibles » (cette condition sera quantifiée plus précisément).

 

En effectuant cette manipulation pour différents diamètres de billes et pour deux fluides différents (air et eau), nous espérons déterminer de quels paramètres dépendent les différentes variables intervenant dans la relation.

 

II – Lois décrivant les écoulements en milieux poreux.

 

 

L’expérience décrite précédemment a été réalisée pour différents milieux et différents fluides :

 

Nous avons choisi de décrire précisément les résultats d’une seule expérience, les autres étant analogues, afin de déterminer les caractéristiques générales de la relation. Les autres expériences nous permettront alors de décrire l’influence du diamètre des billes et du fluide en écoulement sur les paramètres intervenant dans cette relation. Nous allons donc nous intéresser tout d’abord au cas d’un milieu poreux constitué de billes de 1,5 mm de diamètre traversé par un écoulement d’air.

 

         II.1 Loi de Darcy et limites.

 

Le graphique suivant, dans lequel on a porté le gradient de pression en fonction de la vitesse débitante V permet de distinguer deux régimes d’écoulements :

 

Comportement linéaire

(loi de Darcy)

 

fig. 2 : Evolution du gradient de pression en fonction de la vitesse débitante.

 

Il a également été porté sur le graphique précédent la droite qui approche au mieux les points expérimentaux pour les faibles débits.
Le coefficient de proportionnalité dépend de la viscosité du fluide, mais également       coefficient  appelé perméabilité intrinsèque (l’indice d rappelle que l’on se place dans le cadre de la loi de Darcy). Ce coefficient ne dépend en fait que de la nature du milieu poreux. Remarquons que le gradient de pression est d’autant plus grand que la perméabilité est faible : un milieu poreux perméable, c’est-à-dire qui résiste peu à l’écoulement, est donc caractérisé par une grande valeur de sa perméabilité. Une analyse dimensionnelle de la loi de Darcy permet de montrer que la perméabilité est homogène à une longueur au carré. Le coefficient  s’exprime donc en m.

 

Pour déterminer quelles forces sont négligeables en régime de Darcy mais deviennent prépondérantes lorsque la vitesse débitante augmente, revenons à l’équation de Darcy :

En terme de bilan de forces, cette équation tient compte des forces de pression ainsi que des forces de frottement visqueux liquide-solide à l’interface séparant le fluide des sphères du milieu poreux. Remarquons que cette dernière force est proportionnelle à la viscosité dynamique  et inversement proportionnelle à la perméabilité  du milieu poreux.

 

Nous savons par ailleurs que cet écoulement est régi par l’équation de Navier-Stokes à laquelle il faut adjoindre l’équation de conservation de la masse et la condition d’adhérence du fluide visqueux à la surface des grains solides. L’équation de Navier-Stokes s’écrit vectoriellement (en fait, seule sa projection sur l’axe horizontal nous intéresse) sous la forme :

Cette équation traduit donc le bilan entre les forces d’inertie (), les forces de gravité (), les forces de pression () et les forces de viscosité ().

 

En comparant les lois de Darcy et de Navier-Stokes, on comprend alors que la loi de Darcy ne tient pas compte des forces d’inertie. Cette loi n’est donc valable qu’en régime permanent et pour des écoulements dans lesquels les vitesses débitantes sont suffisamment faibles pour que les forces d’inertie soient bien négligeables devant les forces de viscosité. Au fur et à mesure que la vitesse augmente, l’effet des forces d’inertie augmente et explique que l’écart entre la courbe expérimentale et la droite de Darcy soit de plus en plus important.

 

         II.2 Influence des forces d’inertie.

 

On souhaite désormais tenir compte des effets d’inertie. D’après l’équation de Navier-Stokes, les forces d’inertie s’expriment dimensionnellement en. Elles sont donc proportionnelles au carré de la vitesse débitante et sont bien négligeables devant les forces de viscosité (proportionnelles à la vitesse débitante) lorsque V est suffisamment faible.

 

Pour examiner les effets d’inertie, il est intéressant de considérer le nombre de Reynolds qui permet de caractériser, rappelons-le, l’importance relative des forces d’inertie et de viscosité.

 

 

 

Ce nombre est défini par la relation :

Etant donnée la complexité de la géométrie du milieu poreux et la non linéarité de l’équation de Navier-Stokes, la résolution formelle des équations de la mécanique des fluides est impossible. En revanche, une simulation numérique permet d’expliquer en termes de lignes de courant comment se manifestent les effets d’inertie sur l’écoulement (cette simulation numérique a fait l’objet d’un autre projet, nous en reprenons seulement les résultats) :

 

II.3 La loi de Forcheimer.

 

Nous avons vu que les forces d’inertie s’expriment dimensionnellement en. Pour en tenir compte mathématiquement dans l’équation décrivant l’écoulement, il convient donc d’introduire un terme en. L’équation porte alors le nom de loi de Forcheimer et s’écrit sous la forme :

Il est important de noter que la perméabilité de Forcheimer est différente de celle de Darcy (nous pourrons le vérifier plus loin sur le calcul des valeurs numériques). Cela signifie en particulier que le membre de droite de l’équation de Forcheimer ne peut pas s’interpréter comme la somme d’un terme de viscosité (selon la loi de Darcy) et d’un terme d’inertie en.

Le coefficient  qui intervient est appelé coefficient d’inertie et une analyse dimensionnelle de l’équation de Forcheimer montre que ce coefficient est homogène à l’inverse d’une longueur.

 

Il est également intéressant de mettre cette équation sous forme adimensionnelle, c’est-à-dire en faisant apparaître le nombre de Reynolds. Pour cela, il suffit de multiplier l’équation de Forcheimer par.

On obtient alors :

que l’on écrit sous la forme :

 

en introduisant le nombre de Darcy défini par la relation suivante :.Toujours dans le cas de billes de verre de diamètre 1,5 mm traversées par un écoulement d’air, la courbe expérimentale que nous avons obtenue a l’allure suivante et se présente effectivement à forte vitesse débitante sous la forme d’une droite :

 

fig. 3 : Evolution du nombre de Darcy en fonction du nombre de Reynolds
(diamètre des billes de 1,5 mm – écoulement d’air)

 

Les deux lois fondamentales qui gouvernent les écoulements monophasiques dans les milieux poreux étant posées, nous pouvons maintenant passer à l’interprétation des expériences que nous avons réalisées.

 

 

III – Résultats des expériences.

 

         III.1 Principe.

 

Pour chaque expérience, nous avons mesuré le gradient de pression correspondant à la vitesse débitante V que nous avons imposé. Nous avons alors effectué les calculs suivants :

 

 

III.2 Résultats bruts.

 

                   III.2.1. Cas de l’air.

 

On reproduit ici les courbes  et dans le cas d’un écoulement d’air :

 

fig. 4 : Evolution du gradient de pression en fonction de la vitesse débitante.

 

fig. 5 : Evolution du nombre de Darcy en fonction du nombre de Reynolds.

 

On constate heureusement que les droites de la figure 5 sont sensiblement parallèles, ce qui correspond à la proportionnalité des coefficients  pour les différents diamètres de billes. On peut également remarquer sur les courbes de ce même graphique (c’est surtout visible pour un diamètre de 2 mm) que l’écart entre les points expérimentaux et la droite des moindres carrés est le plus élevé pour des nombres de Reynolds faibles. Nous pensons que ce phénomène est dû à une trop faible sensibilité du capteur de pression lorsque le débit est faible. Nous avons également remarqué, sans pouvoir fournir d’explication, que les points expérimentaux obtenus lors d’une augmentation progressive du débit de fluide ne se superposent pas exactement à ceux obtenus lors de la diminution du débit. Ce phénomène est le plus visible à faible débit. Il s’agit là encore certainement d’un défaut du capteur de pression.

 

 

fig. 6 : Evolution du gradient de pression en fonction de la vitesse débitante.

 

fig. 7 : Evolution du nombre de Darcy en fonction du nombre de Reynolds.

 

Le calcul des coefficients,et β selon la méthode indiquée en III.1 a été regroupé dans un tableau présenté en III.3 en même temps que les résultats concernant l’eau dont les courbes expérimentales sont regroupées ci-dessous.

 

                   III.2.2 Cas de l’eau.

 

Lorsque l’écoulement a été réalisé avec de l’eau, seuls les diamètres de 1,5 et 2 mm ont été étudiés. Les résultats sont regroupés dans les deux graphiques suivants :

 

fig. 8 : Evolution du gradient de pression en fonction de la vitesse débitante.

 

 

fig. 9 : Evolution du nombre de Darcy en fonction du nombre de Reynolds.

 

Dans tous les cas (c’est-à-dire pour tous les diamètres et pour les deux fluides), on remarque que la croissance du gradient de pression est d’autant plus lente que le diamètre des pores est grand. Pour un même fluide, cela est dû au fait que la perméabilité du milieu est une fonction croissante du diamètre des pores : plus la perméabilité est grande et moins le milieu résiste à l’écoulement. Ainsi, plus le diamètre des pores augmente (i.e. plus la perméabilité est élevée) et plus la perte de pression sur une longueur donnée de milieu poreux est faible.

L’ensemble des courbes a  permis de calculer les différents coefficients intervenants dans les lois de Darcy et de Forcheimer.

 

                   III.3. Calcul des coefficients.

 

Les résultats sont résumés dans le tableau suivant :

 

 

Modèle adopté

 

Darcy

Forcheimer

Adimensionnel

 

Coefficient calculé

Diamètre des pores
(en mm) et nature du fluide

 ()

()

β ()

()

β ()

1,5

Air 22,2 °C

6203,1

6133,33

Eau 19,7 °C

20000

16494

2

Air 21,2 °C

3787,7

3990,3

Eau 19,7 °C

20000

15510,5

3

Air 21,8 °C

2650,9

2750,7

4

Air 19,7 °C

2140

1856,2

5

Air 19,7 °C

752,6

707,8

6

Air 19,9 °C

934,96

1355,9

 

Ces valeurs montrent que :

 

Les valeurs numériques des différents coefficients intervenants dans les lois gouvernant les écoulements étudiés étant désormais connues, nous pouvons passer à l’interprétation des résultats obtenus.

 

IV – Interprétation des résultats.

 

         IV.1. Principe.

 

Nous avons montré que le gradient de pression varie de manière linéaire avec la vitesse débitante uniquement pour des débits « faibles » (c’est-à-dire lorsque les effets d’inertie sont négligeables devant les effets de la viscosité). L’écoulement suit alors la loi de Darcy. Sinon, pour les forts débits, la loi de Forcheimer permet de modéliser correctement le comportement de l’écoulement. Cela étant, on peut s’interroger sur l’influence de plusieurs autres paramètres :

 

 

IV.2. Influence du diamètre des pores.

 

Nous avons montré précédemment que la perméabilité de Forcheimerest homogène à une longueur au carré et que le coefficient d’inertie β est homogène à l’inverse d’une longueur.
L’objet de ce paragraphe est d’évaluer de quelle manière ces paramètres dépendent du diamètre des pores. Rappelons que l’on peut écrire la loi de Forcheimer sous une forme adimensionnelle :

Les différents termes de cette équation étant sans dimension, on peut s’attendre à ce que  soit proportionnel à et que β soit proportionnel à. C’est ce que nous proposons de vérifier ici. Etant donné que les mesures avec l’eau n’ont été réalisées que pour deux diamètres de pores différents, ce qui est évidemment insuffisant pour déterminer une tendance avec fiabilité, on se limite dans ce paragraphe au cas de l’air.

 

Si ces deux relations de proportionnalité sont vraies, alors les courbes et doivent se présenter sous la forme de droites. Les courbes sont reproduites ci-dessous :

 

fig. 10 : Evolution de en fonction de d dans le cas de l’air.

 

 

 

 




 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Fig. 11 : Evolution de 1/β en fonction de d dans le cas de l’air.

 

Ces deux graphiques confirment les deux hypothèses de proportionnalité que nous avons formulées : pour un fluide donné,  est effectivement proportionnel à et β est  proportionnel à. Nous pouvons maintenant confronter les valeurs numériques obtenues avec les lois empiriques de la littérature.

 

         IV.3. Confrontation des lois empiriques.

 

Différentes lois empiriques permettent d’évaluer les coefficients et β. L’équation de Kozeny-Carman permet d’estimer la perméabilité du milieu. Notant ε la porosité du milieu (qui vaut 37% dans le milieu que nous étudions constitué de billes sphériques), cette loi s’écrit sous la forme :

 

 où A est une constante

 

Le coefficient d’inertie peut être évalué par la formule :

 

 où B est une constante

 

Selon la plupart des études réalisées, le coefficient d’inertie ne dépend que des caractéristiques du milieu poreux (porosité, perméabilité, rugosité). Les valeurs les plus répandues dans la littérature sont : A = 180 et B = 1,8.

 

On peut déjà vérifier sur les expressions de ces lois que, conformément à ce qui a été dit au paragraphe précédent, on a bien proportionnalité entreet, ainsi qu’entre β et. Intéressons-nous maintenant aux valeurs numériques elles-mêmes. Celles-ci ont été regroupées dans le tableau suivant :

 

Fluide

Diamètre des pores

(en mm)

expérimental
(en)

empirique

(en)

β expérimental
(en)

β empirique

(en)

Air

1,5

6133,33

20150,6

2

3990,3

15112,9

3

2750,7

10057,3

4

1856,2

7556,5

5

707,8

6045,2

6

1355,9

5037,6

Eau

1,5

16494

20150,6

2

15510,5

15112,9

Quelques remarques :

 

fig. 12 : Evolution de l’écart entre les valeurs expérimentales et empiriques de la perméabilité en fonction du diamètre des pores.

 

 

Ces différents résultats montrent que les paramètres étudiés ne peuvent pas être prédits avec précision par les lois empiriques. Seule l’expérience permet de les calculer correctement. Il est de toute manière étonnant que les propriétés du fluide (viscosité par exemple) n’interviennent dans aucune des lois empiriques. Au vu des résultats expérimentaux, il semble au contraire que ces paramètres dépendent du fluide en écoulement. C’est ce que l’on se propose de vérifier dans le paragraphe suivant.

 

         IV.4. Influence du fluide.

 

A en croire les lois empiriques de la littérature, les propriétés du fluide n’interviennent d’aucune manière dans les paramètreset β. Rappelons que la loi de Forcheimer sous sa forme adimensionnelle s’écrit sous la forme :

Pour un diamètre de pores donné, si le fluide n’intervient pas, alors les courbes Da = f(Re) relatives à l’air et à l’eau doivent se superposer. Pour vérifier si le fluide intervient dans l’écoulement, on a donc représenté sur un même graphique les courbes Da = f(Re) de l’eau et de l’air pour un diamètre de pores de 1,5 mm :

 

fig. 13 : Influence du fluide sur la courbe Da = f(Re)
 pour un diamètre de pores de 1,5 mm.

 

De même, pour un diamètre de 2 mm, on obtient la courbe suivante :

 

fig. 14 : Influence du fluide sur la courbe Da = f(Re)
 pour un diamètre de pores de 2 mm.

 

Sur les deux droites de chaque graphe, ni les pentes ni les ordonnées à l’origine ne sont égales. On peut donc conclure, à l’inverse de ce que les lois empiriques supposent et aux incertitudes près sur les résultats, que la nature du fluide intervient dans la perméabilité et le coefficient d’inertie.

 

On peut également remarquer que, selon ces deux graphiques, la perméabilité lorsque le fluide est de l’eau est supérieure à la perméabilité lorsque le fluide est de l’air. On observe la même relation d’ordre pour le coefficient d’inertie. Intuitivement (il faudrait répéter l’expérience avec d’autres fluides pour le confirmer), on peut comprendre que cela est dû à la plus grande viscosité de l’eau par rapport à celle de l’air (à 20 °C, Pl tandis quePl).

 

Pour être complet, il reste à vérifier si l’écart entre les valeurs de l’eau et de l’air sont significatives, c’est-à-dire si l’incertitude sur la mesure est bien plus faible que l’écart entre les mesures. C’est l’objet du paragraphe suivant.

 

         IV.5. Incertitude sur les mesures.

 

On va considérer que :

·        L’incertitude liée à l’imperfection du capteur est négligeable devant l’incertitude due à la lecture des valeurs,

·        Les valeurs de la viscosité du fluide, du diamètre des pores et de la distance L séparant les deux prises de pression sont parfaitement connues.

·        Les valeurs de perméabilité sont connues à près.

 

On va donc chercher à évaluer l’incertitude sur le coefficient d’inertie, sachant que le débit est connu à L/min près et que la différence de pression est connue à mbar près.
Avec ces valeurs, trouve une incertitude relative de 0,1. Comme les valeurs du coefficient d’inertie de l’air et de l’eau diffèrent d’un facteur 10, on en conclut que cet écart est significatif et n’est pas dû uniquement aux incertitudes de mesures.

 

Ainsi, contrairement à ce que prétendent les lois empiriques, le coefficient d’inertie dépend des propriétés du fluide en écoulement. Les écarts entre les mesures de l’air et de l’eau sont trop importants pour n’être dus qu’à des incertitudes sur les mesures.

 

 

V – Conclusion.

 

 

Si les milieux poreux constituent un sujet de recherche d’actualité et intervenant fréquemment dans diverses activités industrielles (quelques unes ont été présentées en introduction), ce projet nous a permis d’aborder les mécanismes de base intervenant dans ce domaine, en nous appuyant sur une modélisation simple des milieux poreux.

 

L’établissement par voie théorique d’une loi décrivant de manière générale les écoulements poreux est rendu impossible en raison de la complexité géométrique de tels milieux et de la non linéarité des équations de la mécanique des fluides. Le recours à l’expérience est donc le seul moyen de formuler les lois gouvernant les écoulements dans ces milieux.

Ces expériences que nous avons réalisées nous ont permis de mettre en évidence deux forces fondamentales : les forces de viscosité sont les seules non négligeables à faible débit, puis les forces d’inertie deviennent prépondérantes au fur et à mesure que le débit augmente. Cela justifie l’existence des deux lois de Darcy et de Forcheimer pour décrire ces écoulements.

 

Pourtant, ces deux forces ne sont pas les seules à jouer un rôle. En effet, si nous avons tenu compte des forces de frottement visqueux à l’interface liquide-solide séparant le fluide des sphères du milieu poreux (cf. loi de Darcy), nous n’avons pas pris en considération les forces de viscosité liquide-liquide.  Nous avons également omis l’influence de l’effet Klinkenberg : dans les gaz à très faible pression, le fluide ne peut plus être considéré comme un milieu continu et les équations de la mécanique des fluides ne sont donc plus valables. Il faudrait alors se placer à l’échelle des pores pour étudier le problème.

 

Malgré ces approximations, nos expériences ont permis de tester l’influence de divers paramètres : le diamètre des pores, la nature du fluide ont été étudiés. Ensuite, la confrontation avec les lois empiriques des milieux poreux a permis de montrer leurs limites : étant donné la grande variété des milieux poreux, des expressions formelles générales de la perméabilité et du coefficient d’inertie sont bien difficiles à établir et, dans la plupart des cas, seule l’expérience peut conduire à une bonne estimation de ces paramètres. Dans cet esprit d’essayer de trouver des lois générales, il a d’ailleurs été tenté de déterminer une loi globale regroupant dans une même expression les cas de Darcy et de Forcheimer.